Depuis une quinzaine d’années, un intérêt grandissant pour l’importance du bois mort
et sénescent dans les écosystèmes forestiers concorde avec le constat inquiétant que la
persistance et le recrutement des arbres morts et vivants de grande taille sont mis à
mal par les pratiques forestières en forêt aménagée depuis les dernières décennies.
Ces attributs des forêts sont associés à la survie d’une foule d’organismes et leur
raréfaction dans les forêts aménagées est connue pour grandement affecter la
biodiversité. La communauté cavicole est un assemblage d’espèces de vertébrés qui
utilisent les cavités d’arbres et dont les interactions sont hiérarchiquement organisées.
C’est dans le contexte d’un manque de connaissances quant à l’utilisation par la faune
des cavités d’arbres en forêt tempérée que s’inscrit la présente étude réalisée en 2015
et 2016 dans le Parc régional de la montagne du Diable, dans le domaine
bioclimatique de l’érablière à bouleau jaune (Saucier et al. 1998). Répondant tant à
des besoins identifiés dans la littérature qu’à des enjeux soulevés par des intervenants
en foresterie, le présent mémoire de maîtrise dressera le portrait complexe de cette
communauté dépendante des arbres sains, sénescents et morts arborant des cavités, en
évaluant les caractéristiques des arbres sélectionnées par les utilisateurs ainsi qu’en
présentant la structure d’interactions qui relie les diverses espèces végétales et
fauniques au sein de cette communauté. La recherche active de cavités non-excavées
(issue de la dégradation naturelle d’une blessure d’arbre) et excavées (par les espèces
excavatrices de la communauté) a été menée au moyen d’inventaires systématiques
dans 165 ha de forêts feuillues et mixtes où toutes les cavités trouvées ont fait l’objet
de visites à l’aide de caméras. Ce mémoire est présenté sous la forme de deux
chapitres. Le premier aborde la question de la sélection des arbres par la faune. La
découverte de 210 utilisateurs de cavité d’arbres a permis de confirmer l’utilisation à
la fois de cavités issues de la dégradation naturelle ainsi qu’excavées par les oiseaux
excavateurs. Subséquemment, des analyses statistiques ont permis d’évaluer la
sélection des caractéristiques des arbres à cavités par l’ensemble de la communauté
utilisatrice de cavité (excavateurs et non-excavateurs). Ces résultats, en plus de
souligner l’importance des arbres aux forts diamètres dans la sélection des arbres à
cavités par les espèces cavicoles, revèlent également l’importance de conserver
l’ensemble du spectre de dégradation des arbres à cavités lorsque la conservation de
l’ensemble de la communauté cavicole est visée. Le deuxième chapitre illustre et
explique la structure des interactions liant les diverses espèces végétales et fauniques
de la communauté cavicole, sous forme d’un réseau écologique. Nos résultats
montrent un réseau cavicole supporté par une forte diversité de liens associant les
essences d’arbres aux producteurs de cavités. Aidé de divers indices issus de la
théorie des réseaux écologiques et d’analyses de suppression des agents producteurs
de cavités nous présentons la structure d’une communauté cavicole en forêt feuillue.
Finalement, nous soulignons la fragilité de la communauté cavicole de ces forêts à différents scénarios d’aménagement forestier au moyen de simulations portant sur le
prélèvement de divers arbres à cavités.