Le Canada possède l’une des plus grandes superficies de milieux humides du monde.
Les sols organiques dominent ces écosystèmes. La forêt boréale sur sol tourbeux
occupe environ 1,7 million d’hectares au Québec. L’épinette noire est l’espèce
dominante de ces milieux humides tourbeux. La productivité forestière dans les
pessières tourbeuses est faible comparativement à des pessières évoluant sur des sols
bien drainés parce que les sols tourbeux sont généralement caractérisés par un niveau
d’hydromorphie élevé, ainsi que des conditions extrêmes d’acidité et une faible
disponibilité des éléments nutritifs. Il est également connu que les sols tourbeux
hydromorphes émettent beaucoup de carbone (C) dans l’atmosphère sous la forme de
méthane (CH4), un gaz à effet de serre (GES) puissant. L’introduction du mélèze
laricin dans les stratégies de reboisement pourrait faciliter l’aménagement de ces
peuplements parce que cette essence a le potentiel d’améliorer la qualité du sol, le
recyclage et la disponibilité des éléments nutritifs, le rendement des peuplements et
les taux d’évapotranspiration. Ce mémoire se penche plus spécifiquement sur la
dynamique du C dans les sols tourbeux le long d’un gradient de mixité entre
l’épinette noire et le mélèze laricin. Nous posons la question centrale suivante : le
mélèze laricin influence-t-il positivement la qualité nutritionnelle des sols organiques
et les flux de carbone (CO2 et CH4) en peuplements mixtes avec l’épinette noire se
développant sur sols tourbeux ? La majorité de nos parcelles dans les trois sites n’ont
pas émis de CH4, suggérant une absence d’influence de composition en espèces sur
l’émission de méthane. La respiration du sol, c’est-à-dire l’émission de CO2, a été
influencée par la température et le contenu volumétrique en eau (CVE) du sol. Audessus
de 10°C, le mélèze laricin manifeste une influence négative et significative sur
la respiration des sols organiques. Nos résultats montrent que même si les trois
peuplements retenus se sont développés sur une épaisse couche organique, ces
derniers se distinguent de par les propriétés physicochimiques des sols. Les variations
de la proportion de surface terrière du mélèze laricin à l’intérieur d’un même
peuplement n’a pas tant affecté les conditions du sol, en comparaison à l’effet du
peuplement. Toutefois, cela n’indique pas nécessairement que les plantations de
mélèze laricin pourraient réellement, altérer significativement les émissions de CO2 à
l’échelle du paysage. Nous suggérons la prudence dans l’emploi de cette approche
dans un contexte de changements climatiques.