L'aménagement de la forêt boréale, particulièrement lorsqu'il a pour but l'extraction de bois sur une base soutenue, transforme profondément le paysage. La perte et la fragmentation de l'habitat ainsi que le rajeunissement de la matrice forestière augmentent les contraintes de dispersion des organismes et réduisent la disponibilité de certains éléments d'habitats associés aux forêts matures et âgées, tel le bois mort. De nombreux organismes, incluant les insectes saproxyliques, sont dépendants du bois mort comme habitat et/ou comme source d'alimentation durant leur cycle de vie. Ils peuvent toutefois potentiellement pallier à cette diminution grâce à leur capacité de dispersion. L'objectif de la présente étude est de mesurer la capacité des insectes saproxyliques à coloniser les parcelles de forêt résiduelle âgée en fonction de la quantité de bois mort disponible, de la quantité de vieilles forêts dans le paysage, de l'isolement des forêts résiduelles dans l'agglomération de coupes et du temps depuis la mort de l'arbre hôte. Nous avons mis en place un dispositif expérimental de 30 parcelles dans lesquelles nous avons créé 3 ou 6 souches hautes d'épinettes noires. Chaque souche a été écorcée 4, 12 ou 16 mois après sa création. Les coléoptères au stade adulte et au stade larvaire présents sous l'écorce ont été recueillis et identifiés. Les caractéristiques des arbres hôtes, la quantité de bois mort disponible dans chacune des parcelles, la quantité de forêt âgée de plus de 90 ans autour des forêts résiduelles dans le paysage et la distance des forêts résiduelles aux massifs non coupés ont été calculées. Les résultats obtenus suite aux analyses canoniques de redondance ainsi qu'aux analyses de régression simples et multiples indiquent que la composition et la richesse des assemblages sont principalement associées aux attributs de l'hôte et plus particulièrement au temps depuis la mort des arbres. La composition des assemblages n'est que faiblement associée à la quantité de forêt âgée dans le paysage. L'isolement des forêts résiduelles aux massifs non coupés sur des distances allant jusqu'à 34 km ne montre pas d'effet sur la richesse et la composition des communautés d'insectes saproxyliques. L'aménagement forestier dans ce secteur d'étude ne semble donc pas représenter une contrainte à la colonisation pour les coléoptères phloeophages et xylophages dépendant d'arbres récemment morts.