Les feux de forêts constituent l’une des perturbations majeures affectant la
dynamique forestière de la forêt boréale. Ces incendies sont responsables, de concert
avec les caractéristiques physiques du territoire, de l’existence de peuplements d’âges
et de compositions différentes. L’aménagement écosystémique basé sur une bonne
connaissance du cycle des feux, vise à reproduire adéquatement la variété de classes
d’âges, le type de peuplements et les composantes structurales qui sont rencontrés
dans les forêts non aménagées. L’objectif de ce mémoire est de décrire le régime
naturel des feux dans la forêt mixte de la Gaspésie. L’importance de facteurs spatiotemporels
sur la fréquence des feux est également évaluée.
L’étude a été réalisée sur un territoire d’environ 6480 km2 et couvre une
période de 280 ans. Les archives du Ministère des Ressources Naturelles du Québec
et des photographies aériennes ont été utilisées pour consigner la plupart des feux
ayant eu lieu depuis le début du 20e siècle. Le territoire non brûlé depuis le début du 20e siècle a été échantillonné au moyen de techniques dendrochronologiques. Le
territoire a d’abord été divisé en hexagones de 40 km2 où des placettes ont été
disposées le long de transects afin d’échantillonner les placettes de manière
systématique. Nous avons prélevé de 5 à 10 carottes et/ou galettes d’arbre par
transects. Par la suite, nous avons déterminer l’âge des ces arbres pour, par la suite,
attribuer un temps depuis le dernier feu (TDDF) à chacun des hexagones.
L’ensemble des données a été numérisé dans le système d’information géographique
Arc View.
Suite à l’échantillonnage, la distribution incluant les superficies qui
proviennent de différentes périodes après feu a été analysée en utilisant la distribution
exponentielle négative et les analyses de survie. Contrairement à l’idée répandue, le
cycle de feu, pour l’ensemble de la période étudiée, est assez court, soit d’environ 200
ans. Les deux domaines bioclimatiques et les différentes unités de paysage présents
dans la région de la Baie-Des-Chaleurs n’influencent en aucun cas le régime des feux.
La proportion de forêt incendiée reste constante jusqu’en 1850, pour ensuite diminuer
de manière significative. En effet, un allongement dans le cycle de feu (108 à 182
ans) a été observé après la fin du Petit Âge Glaciaire (PAG) (˜ 1850). Le calcul de
l’indice forêt météo, effectué entre 1920 et 2003, démontre une diminution
significative de l’indice d’inflammabilité extrême suggérant q’une diminution de
conditions climatiques menant à des périodes d’extrême sécheresse, pourrait être
responsable de l’augmentation du cycle de feu, ici et ailleurs au Canada.
Nos résultats concordent donc avec d’autres études semblables, réalisées au
Québec et au Canada. Ils démontrent une baisse de la fréquence des feux
possiblement reliés aux changements climatiques survenus après la fin du PAG. La
présence de long cycle de feu en Gaspésie suggère que le recours à l’aménagement
équien à rotation courte, inspiré des feux en forêt boréale, n’est pas bien adapté. Des
pratiques alternatives devraient être envisagées par les aménagistes forestiers s’ils
veulent atteindre leurs objectifs en matière de développement durable et de maintien
de la biodiversité. © 2004 UQAM tous droits réservés.